La place des personnes âgées dans les coopératives

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Par Jean Sirois, avocat et membre de la coopérative Wurtele

Comme avocat, je reçois des appels de membres âgés de coopératives d’habitation qui s’inquiètent de leur futur comme membres locataires dans une coopérative.

La principale cause de l’inquiétude vient de l’interprétation du contrat de membre entre la coopérative et le locataire-membre. En effet, dans certaines coopératives, tous les membres doivent participer au fonctionnement en faisant des tâches diverses, dont celles liées à l’entretien des immeubles. Certains membres, à cause de leur état physique et de leur âge avancé, ne peuvent pas participer à toutes les tâches prévues dans le contrat de membre.

Est-ce qu’on peut légalement suspendre ou exclure un membre qui, à cause de son état physique ou mental, ne peut accomplir ses tâches et qui devient ainsi en infraction en vertu du contrat de membre ? Selon moi, la réponse est non. En effet, le contrat de membre est un contrat d’adhésion qui est soumis aux différentes lois du Québec tant dans son application que dans son interprétation. Une interprétation trop restrictive du contrat de membre serait dans un premier temps non conforme au Code civil du Québec. Celui-ci est basé sur le principe que la bonne foi doit gouverner la conduite des parties, tant au moment de la naissance du contrat (arrivée du membre) que durant son exécution (occupation du logement) ou de son extinction (départ du membre).

Par ailleurs, selon la Loi sur les coopératives, les coopératives d’habitation réalisées dans le cadre d’un programme d’aide à l’habitation doivent préserver l’affectation sociale ou communautaire de leurs immeubles. Il est aussi à noter que la Société d’habitation du Québec, dans son guide d’élaboration, indique que le Volet 1 de son programme AccèsLogis s’adresse aux familles, aux personnes seules ou aux ainé.e.s autonomes. On peut définir un.e ainé.e autonome comme étant une personne qui peut :

  • vivre seule dans son logement;
  • bien s’alimenter et être en mesure de faire cuire un repas ;
  • pouvoir, sans aide extérieure, s’habiller et se déshabiller ;
  • entretenir une bonne hygiène personnelle par soi-même ;
  • se déplacer sans grande difficulté à l’intérieur de son appartement.

Donc, si une coopérative tentait de suspendre ou d’exclure un tel membre, elle n’agirait pas de bonne foi et de plus serait en contravention avec la Loi sur les coopératives.

Par ailleurs, toutes les coopératives qui ont été réalisées dans le cadre d’un programme fédéral ou provincial et qui ont reçu des subventions ont l’obligation d’offrir des logements sociaux.

La Charte québécoise des droits et libertés interdit la discrimination fondée sur l’âge et détermine qu’il y a discrimination lorsqu’une distinction, exclusion ou préférence a pour effet de détruire ou de compromettre un droit reconnu.
De plus, il est aussi prévu spécifiquement que toute personne âgée ou toute personne en situation de handicap a le droit d’être protégée contre toute forme d’exploitation.

Donc, il y a lieu d’accommoder les personnes âgées en fonction de leur capacité physique et mentale.

Vous souhaitez faire entendre votre voix et celle de votre coopérative dans le CITÉCOOP, soumettez-nous votre texte à diffusion@fhcq.coop


Tiré de l'article publié dans le magazine CITÉCOOP - Volume 10, numéro 19 | Printemps 2023.