Réaction au projet de règlement de SHQ visant à resserrer les règles d’attribution des logements sociaux

Reconnaître la différence coopérative

Le Devoir du 21 février nous apprenait que la Société d’habitation du Québec et le gouvernement Legault travaillent sur un projet de règlement visant à resserrer les règles d’attribution des logements sociaux. L’objectif : inciter les ménages qui améliorent leur condition de vie à quitter leur logement social ou abordable pour embrasser le marché privé.

Un tel règlement n’aura pas d’effet réel sur la crise du logement, car il se contente de pelleter le problème vers l’avant. Les ménages que l’on aura incités à rejoindre le marché privé n’auront pas, pour la plupart, la capacité de soutenir cet effort financier. À terme, c’est une nouvelle classe de pauvres que l’on produira, sans parler de l’exode des familles vers l’extérieur des villes.

Pour les coopératives d’habitation, ce projet est particulièrement dangereux. Il témoigne d’une méconnaissance et d’une solide dose de préjugés, alimentées par le mythe selon lequel le modèle coopératif profiterait à des gens qui n’ont pas besoin d’un loyer abordable. Cette idée reçue, reprise par Le Devoir, stigmatise les coopératives et leurs membres et ne correspond pas à la réalité.

On fait fi de la mixité sociale qui est pourtant un principe fondamental au cœur du succès du projet collectif des coopératives. En les traitant comme des HLM, le Québec se prive d’un outil puissant pour endiguer les effets négatifs de la financiarisation du marché immobilier sur la classe moyenne.

Il importe de savoir que les coops ne cherchent pas des locataires, mais des membres aux profils de compétences diversifiés. Cette mixité propre à la formule assure le dynamisme et l’agilité des milieux de vie. Elle favorise l’intégration plutôt que la stigmatisation. Elle valorise la collectivité plutôt que l’individualisme. Aujourd’hui, cette richesse est menacée par les intentions du gouvernement.

Il est impératif de voir les coopératives d’habitation comme ce qu’elles sont réellement : des entreprises orientées vers le bien collectif. Ces dernières jouent un rôle de levier économique et social pour leurs membres et la société, en plus de servir de filet social dans les situations difficiles.

Au fil du temps, elles ont démontré leur capacité à faciliter la résilience des plus vulnérables, notamment les aînés et les familles monoparentales qui, chaque jour, bénéficient de la solidarité des réseaux coopératifs. Le modèle a toutes les qualités requises pour devenir l’un des fers de lance d’un projet de société articulé autour du logement.

La vision portée par le gouvernement risque toutefois d’hypothéquer ce modèle riche en solutions pour le Québec. En lieu et place, on ignore plutôt la crise qui fait rage, puis on peine à financer les projets qui sont déjà dans les cartons et qui représentent quelque 10 000 logements. Le Québec aurait tout à gagner à investir pour développer ces logements.

Patrick Préville, directeur général de la FHCQ

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